Gaza / Israël : la portée des mandats d’arrêt délivrés récemment par la Cour Pénale Internationale (CPI) et la surprenante réaction officielle de la France…

Note de l’auteur: une version en espagnol de ce texte est également disponible ici.

«Between the onset of winter and rain, there’s an ever-pressing need for proper shelters and winter clothes. The conditions in Gaza city are horrendous. Thousands of recently displaced people, predominantly from Jabaliya, Beit Lahiya and Beit Hanoun, are sheltered in partially destroyed buildings or makeshift camps in inhumane conditions with severe food shortages and terrible sanitary conditions. The women I met had all either lost family members, were separated from their families, had relatives buried under rubble, or were themselves injured or sick.

Breaking down in front of me, they desperately pleaded for a ceasefire.

I met with fishers in Khan Younis. Over 4,000 fishers and 14,000 others depend on this industry. Since the start of the war, trawlers, nets and other equipment have been destroyed and around at least 67 fishers have been killed by the Israeli military. Despite this, out of sheer desperation some of them enter the sea at the risk of being shot at by the Israeli Navy«.

Extrait de communiqué de presse du Haut Commissariat opur les Droits de l’Homme des Nations Unies du 29 novembre 2024 (voir texte) fort peu référencié dans la grande presse internationale.

Introduction

Le 21 novembre 2024, la Chambre préliminaire de la Cour pénale internationale (CPI) a annoncé qu’elle avait confirmé et délivré des mandats d’arrêt à l’encontre de deux hauts dirigeants israéliens et d’un chef de l’aile militaire du Hamas à Gaza.

Les mandats d’arrêt concernent plus précisément l’actuel Premier ministre et ministre de la Défense d’Israël jusqu’à il y a quelques semaines (voir le communiqué de presse officiel de la CPI) tout comme un haut commandant militaire du Hamas considéré comme responsable de la planification et de la coordination de l’attaque du 7 octobre 2023 (voir le communiqué de presse).

Dans son premier communiqué concernant les autorités israéliennes, les juges de la CPI ont constaté que :

«With regard to the crimes, the Chamber found reasonable grounds to believe that Mr Netanyahu, born on 21 October 1949, Prime Minister of Israel at the time of the relevant conduct, and Mr Gallant, born on 8 November 1958, Minister of Defence of Israel at the time of the alleged conduct, each bear criminal responsibility for the following crimes as co-perpetrators for committing the acts jointly with others: the war crime of starvation as a method of warfare; and the crimes against humanity of murder, persecution, and other inhumane acts. The Chamber also found reasonable grounds to believe that Mr Netanyahu and Mr Gallant each bear criminal responsibility as civilian superiors for the war crime of intentionally directing an attack against the civilian population«.

Dans le second communiqué concernant le chef militaire du Hamas, on y lit que:

«The Chamber found reasonable grounds to believe that Mr Deif, born in 1965, the highest commander of the military wing of Hamas (known as the al-Qassam Brigades) at the time of the alleged conduct, is responsible for the crimes against humanity of murder; extermination; torture; and rape and other form of sexual violence; as well as the war crimes of murder, cruel treatment, torture,; taking hostages; outrages upon personal dignity; and rape and other form of sexual violence.

The Chamber found reasonable grounds to believe that Mr Deif bears criminal responsibility for the aforementioned crimes for (i) having committed the acts jointly and through others and (ii) having ordered or induced the commission of the crimes, and (iii) for his failure to exercise proper control over forces under his effective command and control».

Dans cette récente entrevue faite par un media numérique israélien (Magazine+972,  édition du 26 novembre), on lit que, pour l’un des représentants  des victimes palestiniennes,

«Additional indictments are not just possible — they are probable. The ICC’s jurisdiction covers crimes committed since 2014, a period that encompasses a wide range of documented violations, including extrajudicial killings, illegal settlements, and the blockade of Gaza. These are not isolated incidents but part of a broader pattern of systemic oppression

Dans les lignes qui suivent nous essaierons d’analyser le contexte procédural dans lequel ces trois mandats d’arrêt ont été confirmés par trois juges de la CPI, et d’expliquer la portée de cette décision attendue depuis de fort longs mois par les victimes palestiniennes et israéliennes et leurs représentants, mais aussi par de nombreux secteurs de par le monde et par la communauté internationale dans son ensemble.

Au détour des réactions officielles de certains Etats, nous commenterons un communiqué officiel de la France du 27 novembre plus que surprenant, et qui semble faire fi, pour des raisons encore inconnues, de la jurisprudence de la CPI concernant l’immunité des chefs d’Etat: une jurisprudence qui soit dit en passant, n’a jamais été contestée par la France.

Israël et ses manoeuvres

Comme à l’accoutumée, les plus hautes autorités israéliennes n’ont rien trouvé de mieux que d’accuser les juges de la CPI qui ont pris cette décision d’ «antisémitisme» (voir article du TimesofIsrael). Ces déclarations incendiaires des dirigeants israéliens ne sont pas nouvelles, et peuvent expliquer en partie l’origine des menaces contre les juges et le personnel de la CPI, qu’a dénoncé sa Présidente le 28 novembre 2024 (voir texte de son communiqué officiel en francais et en anglais).

Le 2 décembre 2024, le bureau du Procureur de la CPI a rejeté une ultime manoeuvre, quelque peu désespérée, d’Israël contre cette décision de la Chambre préliminaire de la CPI (voir document). Dans un autre rejet  concernant une autre manoeuvre, toute aussi désespérée (voir document également daté du 2 decembre 2024), on y lit que le Procureur rappelle aux juges de la CPI un détail dont Israël se garde bien de faire mention dans ses écrits:

«12. The Prosecution recalls that Israel had opportunities to raise its jurisdictional and complementarity concerns but declined to avail itself of them. On 28 January 2020, this Chamber, in another composition, expressly invited Israel to provide submissions on jurisdiction in the context of the rule 103 proceedings that preceded the Chamber’s Article 19(3) Decision confirming the Court’s jurisdiction in this Situation. However, Israel chose not to participate. Then, in March 2021, when the Prosecution opened its investigation in this Situation, Israel, like any other State with jurisdiction, had the opportunity to request the deferral of the investigation under article 18(2) of the Statute. Again, it chose not to do it. The Prosecution even sought Israel’s clarification of its stance on a deferral, to which Israel responded by simply repeating its rejection of the Court’s jurisdiction«.

Il faut préciser que dans sa décision du 21 novembre 2024, la Chambre préliminaire de la CPI avait pourtant bien indiqué aux autorités israéliennes que (voir décision):

«18. The Chamber wishes to reassure Israel that it will not be estopped on the basis of article 19(5) of the Statute from bringing a jurisdictional challenge because of the public statements made by the Prosecutor or the Requests for Assistance it has received from the Court in relation to the investigation. Israel will have the full opportunity to challenge the Court’s jurisdiction and/or admissibility of any particular case if and when the Chamber issues any arrest warrants or summonses against its nationals».

De quelques réactions et communiqués officiels

Une ONG comme Amnesty International s’est déclarée profondément satisfaite de cette décision, mais a également exigé que les Etats parties au Statut de Rome de 1998, qui a créé la CPI, respectent toutes leurs obligations (voir communiqué de presse). Pour sa part l’ONG israélienne PeaceNow a émis un communiqué saluant cette décision (voir texte): il s’agit d´un texte fort peu médiatisé dans la presse israélienne, tout comme celui d’une autre ONG israélienne, B’Tselem (voir texte).

Au plan international, le communiqué conjoint d’experts en droits de l’homme  des Nations Unies daté du 26 novembre (voir texte) a subi un sort similaire pour ce qui est de sa diffusion: aucune mention de faite dans la grande presse internationale.

. Les Etats-Unis

Comme cela est aussi également devenu habituel, la plus haute autorité des Etats-Unis s’est empressée de discréditer et de disqualifier la décision de la CPI (voir communiqué officiel de la Maison Blanche du 21 november 2024).

On se doit de rappeler cette initiative du Congrès nord-américain datée du 7 mai 2024 qui vise à sanctionner la CPI si elle s’aventurait à ordonner une enquête ou des poursuites concernant les dirigeants politiques et militaires des alliés des États-Unis. Cette initiative, approuvée en juin 2024 (voir l’article du TheGuardian), est justifiée, selon le préambule,

« pour imposer des sanctions à l’égard de la Cour pénale internationale engagée dans tout effort d’enquête, d’arrestation, de détention ou de poursuite de toute personne protégée des États-Unis et de leurs alliés  /  To impose sanctions with respect to the International Criminal Court engaged in any effort to investigate, arrest, detain, or prosecute any protected person of the United States and its allies».

Aucune mention n’est faite d’Israël dans ce texte, mais il est intéressant de noter que l’initiative a été présentée le 7 mai 2024, tout juste quelques semaines avant que le Procureur de la CPI ne demande publiquement des mandats d’arrêt à l’encontre de deux dirigeants israéliens et de trois dirigeants du Hamas le 20 mai. On notera que la liste des promoteurs de cette initiative du Congrès américain comprend certains des proches collaborateurs nommés depuis le 5 novembre par le nouveau Président élu nord-américain pour occuper des postes importants dans sa future administration.

Effet ou non de cette décision de la CPI, en Israël des informations concernant l’irresponsabilité de son Premier Ministre avant l’attaque du 7 octobre 2023 sont exposées en détail dans les principaux quotidiens israéliens (voir par exemple note du Timesof Israel du 24 novembre 2024), ce dont avait informé le média numérique israélien Magazine +972 dans un interview dont la lecture est recommandée, et ce depuis le 11 novembre (voir article). Le 21 novembre, un responsable de «fuiter» des documents hautement sensibles au plus haut niveau s’est retrouvé condamné au beau milieu d’un scandale politique concernant le Premier Ministre et ses manoeuvres pour dissimuler la dite irresponsabilité (voir note du TimesofIsrael).  Le dimanche 24 novembre 2024, les plus hautes autorités d’Israël s’en sont pris au quotidien israélien Haaretz (voir note de Haaretz et de ElPais en Espagne).

. Le G7

Le communiqué d’une réunion des membres du G7 en Italie publié le 26 novembre 2024 (voir communiqué) mérite également d’être mentionné dans lequel on lit que les membres du G7 n’ont pu s’accorder que pour indiquer – en omettant toute référence a la CPI – que:

«In exercising its right to defend itself, Israel must fully comply with its obligations under international law in all circumstances, including International Humanitarian Law. We reiterate our commitment to International Humanitarian Law and will comply with our respective obligations«

Il reste à voir si, dans d’autres enceintes régionales cette fois, les diverses régions du monde seront aussi en mesure d’adopter un communiqué commun, bien plus exigeant et plus précis, notamment dans le cadre de la CELAC  (Amérique Latine et Caraïbes par exemple) que la Colombie présidera dans quelques jours.

La réaction officielle de la France 

La France a pour sa part officiellement «pris acte» de cette décision (voir communiqué de presse), sans oublier de manifester dans son communiqué son soutien aux juges de la CPI: un soutien que 11 ONG françaises ont jugé si fragile… qu’elles se sont empressées de le rappeler aux autorités (voir communiqué conjoint publié sur le site de l´AURDIP).

La fragilité s’est en effet manifestée quelques jours après avec des déclarations officielles ambigües et un second communiqué officiel (voir texte) de la France menant la Fédération Internationale pour les Droits de l’Homme (FIDH) à dénoncer que «La France ment» (voir communiqué du 27 novembre).

Vous avez bien lu «La France ment«, il n’y a aucune erreur de notre part (ni de la part de la FIDH) (Note 1).

Afin de comprendre l’énormité du «mensonge» (au demeurant, fort peu décrié par des universitaires et spécialistes du droit international dans les journaux en France), on peut citer ce communiqué de l´ONG Human Rights Watch indiquant que:

«Arrest obligations exist regardless of an individual’s official status, for example, as a head of state. Article 27 of the Rome Statute very clearly addresses the irrelevance of official capacity, stating that immunities that may attach to the official capacity of a person shall not bar the ICC from exercising jurisdiction. In September, Russian President Vladimir Putin, an ICC fugitive, attended a ceremony in Mongolia, an ICC member country, without being arrested. ICC pre-trial chamber judges ruled that Mongolia violated its treaty obligations when it failed to arrest and surrender Putin and therefore made what is known as a finding of “non-cooperation” and referred the matter to the court’s Assembly of State Parties for enforcement«.

Cette jurisprudence de la CPI n’a jamais été contestée par la France ce qui évidemment rend encore plus déconcertant le communiqué de la France du 27 novembre 2024.

Cette ligne jurisprudentielle appliquée aux visites de chefs d´Etat étrangers en France mérite une explication moins juridique que nous allons tenter de donner : on peut serrer la main de tout chef d´Etat étranger sur le perron de l’Elysée, y ajouter les accolades de rigueur et poses devant les journalistes et ce chef d’Etat bénéficie sur le territoire de la France de l’immunité accordée à tout chef d’Etat, même si il est suspecté de commettre un génocide, des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité ou d’autres violations graves des droits de l´homme. A la question «Il sont nombreux ces chefs d’Etat étrangers?» on peut répondre qu’il y en a effectivement un bon nombre. Par contre, et dans ce cas le nombre est bien moindre, lorsque ces accusations ont été soigneusement examinées et méticuleusement documentées par le Procureur de la CPI, puis revues méthodiquement par trois juges de la CPI, et que ce chef d’Etat étranger fait finalement l’objet d’un mandat d’arrêt délivré par une Chambre préliminaire de la CPI, le droit international s’impose automatiquement aux autorités françaises en vertu du Statut de Rome: on procède alors à la capture de ce même chef d’Etat s’il se trouve en France par les autorités nationales compétentes, et on le remet sans tarder aux juges de la CPI à La Haye. Fini le temps des accolades.

La position de la France concernant le Premier ministre israélien est d’autant plus surprenante qu’ en juin 2024, une décision de la justice française avait écarté le principe de l’immunité dont jouit le chef d´Etat syrien dans le cas d’affaires menées devant les juridictions françaises (voir communiqué sur la décision de la chambre d´instruction de la Cour d’Appel).

Pour sa part, le Syndicat de la Magistrature a dénoncé «L’Executif de la honte» (voir communiqué).

Dans son intervention devant les Etats Parties au Statut de Rome, le représentant de la France a réaffirmé son plein soutien à la CPI (voir document date du 2 décembre 2024), mais…le mal est fait : à ce jour (5 décembre 2024) aucune rectification de la part du Quai d’Orsay concernant son communiqué officiel du 27 novembre n’a été diffusée.

On ignore si la France a bien pondéré les effets d’une telle manoeuvre dans le monde et l’on peut penser qu´elle aura ses effets au plan politique et notamment, diplomatique : par exemple, la France vient d’annoncer la candidature de l´un de ses ambassadeurs pour essayer d’intégrer la CIJ lors des élections prévues en novembre 2026, en l’occurence en poste actuellement comme représentant de la France à La Haye (voir communiqué officiel). Il s’agit d’une candidature soumise au vote au sein de l´Assemblée générale des 193 Etats membres des Nations Unies. Si par le hasard des choses, le candidat de la France n’obtient pas le nombre de votes nécessaires, on pourrait penser que la dite pondération n’a pas vraiment été menée au sein du Quai d’Orsay : en 2018 face au candidat de l’Inde, le Royaume-Uni n’a pas obtenu l’élection du juge britannique pour un second mandat (voir note du Parlement britannique essayant d’expliquer cet échec de sa diplomatie), la CIJ siégeant sans juge britannique … alors qu’elle l’avait toujours fait depuis 1946.

Brève mise en contexte

La demande de mandats d’arrêt du Procureur de la CPI attendait patiemment depuis le 20 mai 2024 : c’est en effet la date à laquelle le Procureur de la CPI a formellement annoncé sa demande de mandats d’arrêt à l’encontre de trois dirigeants du Hamas et de deux hautes autorités israéliennes (voir hyperlien vers l’annonce en anglais et en français).  Le 20 mai, les Etats-Unis se sont sentis obligés d’exprimer leur ferme opposition à l’annonce faite par le Procureur de la CPI (voir le communiqué de presse du Département d’Etat).

Nous avions eu l’occasion d’analyser l’annonce du Procureur de la CPI (voir notre brève note du 20 mai en espagnol) ainsi que, quelques mois plus tard, les démarches entreprises par plusieurs Etats latino-américains auprès de la CPI pour soutenir cette demande en août 2024 (voir notre note à ce sujet en espagnol intitulée : «América Latina ante el drama en Gaza: a propósito de las observaciones enviadas por Bolivia, Brasil, Chile, Colombia y México a la Corte Penal Internacional (CPI)«).

Contrairement à d’autres régions du monde, ce groupe d’Etats a confirmé l’Amérique latine comme un bastion de la justice pénale internationale et de la lutte contre l’impunité rampante, notamment en ce qui concerne les exactions de toute sorte commises par Israël dans le territoire palestinien occupé.

Il convient de noter que l’opinion juridique soumise par le Brésil à la CPI  (voir document) et par la Colombie (voir document), ont été accompagnées par un avis juridique conjoint soumis par le Chili et le Mexique (voir texte), tout comme celui élaboré par l’Afrique du Sud, le Bengladesh, la Bolivie, les Comores et Djibouti (voir texte conjoint). Deux organisations internationales ont également remis aux juges de la CPI leurs avis: l’Organisation de la Coopération Islamique (voir document) ainsi que la Ligue des Etats Arabes (voir document). Pour ce qui est des Etats situés sur le continent européen, on recense en particulier les opinions juridiques de l’Espagne (voir document), de l’Irlande (voir document) et de la Norvège (voir document complet).

Ces divers avis juridiques vont tous dans le même sens que celui soumis par la Palestine (voir document) : la justice pénale internationale est juridiquement parfaitement habilitée pour s’appliquer dans le territoire palestinien occupé, sans limitation d’aucune sorte, et il serait grand temps qu’elle se matérialise par l’émission des mandats d’arrêt sollicités depuis le 20 mai 2024.

Pour les spécialistes et juristes intéréssés par les effets de décisions d’une juridiction internationale sur une autre, on retrouve dans la plupart de ces opinions juridiques une référence à l’avis consultatif du 19 juillet 2024 rendu par la Cour internationale de Justice (CIJ) – voir texte en français – et ce qu’il signale à propos des accords d’Oslo de 1993 : il s’agit là d’un effet notoire, parmi bien d’autres, de cette importante décision de la CIJ, au demeurant fort peu commentée et analysée sur les sites juridiques spécialisés et revues juridiques scientifiques, depuis sa lecture par la CIJ en juillet dernier (Note 2).

Fin août 2024, le Procureur de la CPI avait eu l’occasion de réitérer l’urgence de l’émission de ces mandats d’arrêt dans une déclaration totalement passée sous silence par les grands médias internationaux et sites juridiques spécialisés, exception faite de quelques sites d’ information comme celui de Pressenza  et du site libanais LibnaNews ayant eu la gentillesse de publier nos réflexions (Note 3) : voir notre article en espagnol intitulé «Gaza / Israël : le Procureur de la CPI réaffirme l’urgence des mandats d’arrêt«.

A noter que fin mai 2024, les journalistes d’investigation en Israël de Magazine+972 ont publié un long rapport sur un système d’écoute auquel les services secrets israéliens soumettaient les ordinateurs et l´ensemble du personnel de la CPI, et ce depuis de fort nombreuses années (voir l’article intitulé «Surveillance and intefrerence: Israel’s covert war on ICC exposed»). Les spécialistes concernant le principe de complémentarité en droit pénal international instauré para le Statut de Rome en 1998 devraient notamment s’interesser aux propos suivants recueillis par ces jounalistes israéliens :

«According to the sources, a central goal of Israel’s surveillance operation was to enable the military to “open investigations retroactively” into cases of violence against Palestinians that reach the prosecutor’s office in The Hague. In doing so, Israel aimed to exploit the “principle of complementarity,” which asserts that a case is inadmissible before the ICC if it is already being thoroughly investigated by a state with jurisdiction over it«.

Voilà una facon assez judicieuse d’anticiper des enquêtes en cours au sein de la CPI permettant de mener les siennes au plan interne rétroactivement, afin d’invoquer ensuite le principe de complémentarité.

La justice pénale internationale : un véritable défi pour Israël et ses alliés

Les écoutes permanentes dont a été objet la CPI depuis bien des années s’expliquent par le fait que la CPI en tant que telle constitue un défi majeur pour Israël: quelques indiscrétions diplomatiques passées (mais fort peu connues) permettent de le confirmer.

Ainsi, au mois de novembre 2012, lorsque l’Assemblée générale des Nations Unies a accordé à la Palestine le statut d’« État observateur non membre » (lors d’un vote au cours duquel seuls 9 États ont voté contre, à savoir : Canada, États-Unis, Israël, Îles Marshall, Nauru, Palau, Panama et République tchèque), le Royaume-Uni a choisi de s’abstenir. Toutefois, le Royaume-Uni avait annoncé qu’il voterait pour, mais seulement si la Palestine donnait l’assurance qu’elle n’irait pas devant la CPI :

«The U.K. suggested that it might vote “yes” if the Palestinian Authority offered assurances that it wouldn’t pursue charges in the International Criminal Court, but apparently came away unsatisfied» (voir note de presse de novembre 2012 du The Washington Post, un media dont les correspondants sont en général des journalistes assez bien informés)

Cette profonde inquiétude à l’égard de la justice pénale internationale n’est pas sans rappeler une autre confidence diplomatique antérieure à 2012, rendue publique cette fois par le portail Wikileaks : en relation avec l’offensive militaire israélienne meurtrière à Gaza en 2009 (Note 4), on a pu lire que, lors d’une conversation avec des diplomates américains (voir le câble du 23 février 2010 de l’ambassade des Etats Unis alors à Tel-Aviv), la confidence suivante a été faite par le colonel Liron Libman en 2010 :

Libman noted that the ICC was the most dangerous issue for Israel and wondered whether the U.S. could simply state publicly its position that the ICC has no jurisdiction over Israel regarding the Gaza operation”. 

Le colonel Liron Libman, haut fonctionnaire israélien, était (et est probablement toujours en ce mois de novembre 2024) un fin connaisseur des règles du droit international : il a été pendant de nombreuses années à la tête du département de droit international des Forces de Défense israéliennes (plus connues par leurs sigles en anglais d´IDF).

Plus récemment (2020), il convient aussi de rappeler que dans un communiqué de presse de mars 2020 (voir texte complet), Amnesty International (AI) avait mis en garde l’opinion publique contre la manœuvre d’un petit groupe d’États, tout en soulignant une autre pression, bien plus feutrée, exercée cette fois par le Canada :

«We are also deeply concerned by news reports that one state party, namely Canada, has “reminded the Court” of its provision of budgetary resources in a letter to the ICC concerning its jurisdiction over the “situation in Palestine”, which appears to be a threat to withdraw financial support».

Obtenir une version complète de cette lettre devenue fameuse émise par le Canada en février 2020 serait sans doute l’idéal, mais il semblerait que ce document officiel envoyé à la CPI ne sera jamais rendu public, alors que ce fut une organisation proche d’Israël au Canada la première à en signaler l´existence (voir note de CJNews du 26 février 2020). À moins, bien sûr, que les organisations de la société civile canadienne non seulement dénoncent cette manœuvre, somme toute assez grossière (comme, par exemple l’a fait ce communiqué de l´organisation non gouvernementale CJPMO en date du 3 mars 2020), mais exigent également que leurs autorités la fassent connaître intégralement, en invoquant le principe de transparence : ce afin que l’opinion publique canadienne (et internationale) soient informées de ce que le Canada est capable de faire pour protéger Israël.

Enfin, on rapellera que le dépôt, par la Palestine, le 21 janvier 2009, d´une déclaration d´acceptation de la juridiction de la CPI fut considéré par le service juridique de l´armée israélienne comme une nouvelle forme de terrorisme, inconnue par nombre de spécialistes dans ce domaine : le «terrorisme légal» (Note 5).

Les assassinats israéliens et l’absence de mandats d’arrêt pour les autres dirigeants du Hamas après un (trop) long délai

Pour en revenir a la période plus récente (2024),  on se doit d’indiquer qu’ Israël a procédé à l’assassinat ciblé des autres dirigeants du Hamas visés dans la requête du procureur de la CPI et dans son communiqué du 20 mai 2024.

La Chambre préliminaire de la CPI a donc maintenu les mandats d’arrêt contre les deux responsables israéliens et contre un chef militaire du Hamas (dont on pense qu’il a échappé à une tentative d’assassinat par les forces militaires israéliennes). Sa mort n’ayant pas été confirmée, la CPI n’avait aucun moyen de l’exclure de sa demande. En revanche, nos lecteurs pourront lire la décision de la CPI du 9 septembre 2024 en vue de suspendre la demande de mandat d’arrêt dans le cas spécifique du dirigeant palestinien du Hamas, Ismael Hanyeh, assassiné par Israël le 31 juillet à Téhéran après avoir assisté à l’investiture du nouveau président iranien (voir texte).

La longue attente depuis le 20 mai 2024 est en partie due aux démarches initiées par le Royaume-Uni à la mi-juin, ouvrant un délai supplémentaire dans la procédure pour recevoir des avis juridiques soumis par des États, des ONG et des individus aux trois juges de la CPI: voir décision de la CPI du 27 juin en réponse à la requête britannique faite le 10 juin 2024 et  document remis aux juges de la CPI le 2 juillet 2024 par le Royaume -Uni demandant un délai supplémentaire. Il convient de noter qu’à la suite des résultats des élections britanniques du 4 juillet, les nouvelles autorités britanniques ont choisi de suspendre cette gestion manifestement dilatoire adoptée par leurs prédécesseurs, probablement à la demande d’Israël (et de son fidèle allié nord-américain): voir article de The Guardian du 8 juillet 2024.

Objet d’une campagne de dénigrement de la part de certains cercles d’influence pro israéliens aux Etats-Unis et en Europe, le Procureur et les juges de la CPI ont également été soumis à des pressions diplomatiques de toute sorte de la part de certains grands États donateurs pour qu’aucun mandat d’arrêt ne soit délivré à l’encontre de dirigeants israéliens.

Selon certains experts, les pressions diplomatiques exercées par les États-Unis sont allées encore plus loin, en demandant que, si finalement une décision devait être prise, qu’elle ne soit pas rendue publique avant le 5 novembre 2024, date des élections nord-américaines.

Le caractère insensé de la soi-disant « guerre » menée par Israël  à Gaza

Le dernier rapport des Nations Unies sur la situation à Gaza (voir rapport au 26 novembre 2024) détaille le drame indicible qui se vit sur le territoire palestinien de Gaza et enregistre 44.249 morts. Le rapport antérieur au 21 novembre  (voir le rapport au 19 novembre) rendait compte du caractère insensé de l’action militaire israélienne à Gaza, qui avait fait près de 44 000 morts (et plus de 100 000 blessés) :

«Between the afternoons of 12 and 19 November, according to the Ministry of Health (MoH) in Gaza, 307 Palestinians were killed and 932 were injured. Between 7 October 2023 and 19 November 2024, at least 43,972 Palestinians were killed and 104,008 were injured, according to MoH in Gaza.

Between the afternoons of 12 and 19 November, three Israeli soldiers were killed in Gaza, according to the Israeli military. Between 7 October 2023 and 19 November 2024, according to the Israeli military and official Israeli sources cited in the media, more than 1,576 Israelis and foreign nationals were killed, the majority on 7 October 2023 and its immediate aftermath. The figure includes 376 soldiers killed in Gaza or along the border in Israel since the beginning of the ground operation. In addition, 2,440 Israeli soldiers were reported injured since the beginning of the ground operation«.

Il est à noter que le bilan de plus de 44 200 morts à Gaza est, pour certains spécialistes, bien en deçà de la réalité. En effet, dans un article publié par un spécialiste militaire souvent invité par les médias français et intitulé « Guerres en Ukraine et en Israël, (enfin) des voies de sortie en perspective ? », il est indiqué que le chiffre réel pourrait être d’environ 100 000 personnes tuées à Gaza depuis le 7 octobre 2023 :

les évaluations des dégâts des bombardements montrent – même en hypothèse basse – que le bilan projeté se situe plutôt autour de 100,000 morts et donc de 350,000 blessés (le ratio de 3,5 est la « norme »), soit 20% de la population palestinienne de Gaza « au bas mot » (450,000 / population initiale de 2,3 millions), blessée ou tuée par cette guerre démesurée.

L’absence de données vérifiables est largement due à l’absence de personnel humanitaire déployé dans toute la bande de Gaza et à l’absence de médias capables de documenter et d’informer l’opinion publique internationale sur la réalité de la bande de Gaza et sur l’ampleur exacte des bombardements aériens israéliens sur la population civile. A cet égard, l’assassinat délibéré par Israël de journalistes, de cameramen et d’assistants d’organes de presse a incité une soixantaine d’organisations œuvrant pour la protection des journalistes à hausser le ton et à demander à l’Union européenne (UE) d’agir (voir la lettre collective datée du 22 août 2024). La lettre indique que :

Journalists play an indispensable role in documenting and reporting on war crimes and other human rights violations. The cumulative effect of these abuses is to create the conditions for an information void, as well as for propaganda and mis- and disinformation. While Israel contends that its actions are to keep its people safe, history shows that censorship and denial of the right to information is a flawed path to peace or security. We, therefore, write to you today to call for the suspension of the Israel / EU Association Agreement on the basis that it has violated international human rights and criminal law and for the adoption of targeted sanctions against IDF officials and others responsable”.

Au 22 novembre 2024, selon le Comité pour la Protection des Journalistes (CPJ), le nombre de journalistes tués à Gaza par les forces militaires israéliennes depuis le 7 octobre 2023 s’élève à 137 professionnels du monde de l’information (voir le rapport).

Comme on le sait, malgré une très faible couverture dans les médias grand public, le rapport A/79/384 (voir hyperlien), intitulé « Génocide en tant que suppression coloniale » et rédigé par la rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, a été présenté à l’Assemblée générale des Nations Unies en octobre 2024 : sa lecture intégrale est très fortement recommandée, car il analyse et détaille l’intention génocidaire documentée des autorités israéliennes actuelles à Gaza (voir en particulier les paragraphes 11-23 et les paragraphes 42-48, ainsi que 68-82).

Dans ce communiqué de presse du service de presse des Nations Unies du 30 octobre 2024, on peut écouter sa présentation faite en espagnol ; nos chers lecteurs pourront vérifier par eux-mêmes si ce communiqué de presse et le rapport auquel il se réfère ont été mentionnés dans les médias grand public du monde hispanophone. Ou si, comme c’est souvent le cas, les agences de presse internationales et les médias internationaux ont tout simplement choisi d’ignorer ce rapport.

L’autrice de ce rapport s’est ensuite rendu au Canada le 3 novembre (voir article de de presse), interrogeant au passage toute la société et le soutien des autorités canadiennes au drame indicible de Gaza, en accordant plusieurs interviews à différents médias canadiens (voir l’un d’entre eux).

Le 8 novembre 2024, les Nations Unies ont publié un autre rapport sur la période allant du 1er novembre 2023 au 30 avril 2024 (voir hyperlien) dans lequel on peut lire (page 6) que :

«The monitoring and verification of grave violations remained extremely challenging, including owing to access constraints, a high level of insecurity, and threats and direct attacks also on United Nations personnel, monitors and humanitarian actors. Nevertheless, verification work continued, with the number of killings verified by OHCHR by 2 September 2024 standing at 8,119 Palestinians in Gaza, including 2,036 women and 3,588 children (1,865 boys and 1,723 girls). Of these verified figures, 7,607 were killed in residential buildings or similar housing, out of which 44 per cent were children, 26 per cent women and 30 per cent men«.

Dans les recommandations finales, outre celles adressées aux autorités israéliennes (pp. 29-30), il est indiqué que les États membres des Nations Unies devraient également prendre certaines mesures (page 31) :

«72. The High Commissioner calls on Member States of the United Nations to: 

  1. Consistent with their obligations under international law, assess arms sales or transfers and provision of military, logistical or financial support to a party to the conflict, with a view to cessation of such support to the extent it implicates a real risk of facilitating commission of serious violations of international law; 
  2. Support the work of the International Criminal Court in relation to the Occupied Palestinian Territory; exercise universal jurisdiction to try crimes under international law in national courts, consistent with international standards; and comply with extradition requests pertaining to suspects of such crimes to countries where they would face a fair trial;».

Le rapport d’une commission d’enquête des Nations Unies récemment publié A/79/363 (voir hyperlien) et qui a fait l’objet d’un communiqué de presse des Nations Unies du 14 novembre 2024 intitulé «UN Special Commitee finds Israel´s warfare methods in Gaza consistent with genocide, including use of starvation as  weapon of war«(voir hyperlien) mérite également d’être mentionné : sa faible couverture par les médias internationaux, confirme une tendance devenue malheureusement habituelle depuis le 7 octobre 2023 pour tout rapport international (ou national) décrivant le drame innommable auquel Israël soumet délibérement la population civile palestinienne à Gaza.

Le 14 novembre 2024, la comparution d’un chirurgien ayant opéré des civils à Gaza devant une commission parlementaire britannique la veille a également été diffusée (voir vidéo), dans laquelle il détaille la volonté délibérée d’Israël de causer le plus grand dommage à la population civile, en particulier aux enfants palestiniens.


Photo d’un bombardement israélien sur Gaza survenu le 13 novembre 2024 sur Al-Mawasi: on peut apprécier l’impact sur le sol en raison du type de bombes extremement puissantes utilisées délibérément par Israël pour bombarder des campements de fortune concentrant un grande quantité de réfugiés et de déplacés gazaouis. Photo extraite de cet article de presse intitulé » ‘I don´t care who´s president there. I just want may kids to survive in Gaza’ «, Magazine+972 (Israel), édition du 14 novembre 2024

Dans un article publié récemment sur le site spécialisé d’EJIL-Talk analysant les limites du lexique et du vocabulaire juridique international face à l’ampleur des dommages  causés à la population palestinienne gazaouie (Note 6), on peut lire dans sa conclusion que:

«In 2009, Jewish Israeli scholar Grinberg wrote forcefully of his disdain for neologisms and scholarly efforts to analyse ‘The Thing without a Name’ – the past and ongoing erasure of Palestine and its people. He argued that each new term erected was vulnerable to caveats and to collapse. Ultimately, he concluded his article on ‘speechlessness’ by reiterating the power of Arabic terms that have been available since the creation of the Israeli state itself. Nakba as a word used in English discourse in particular has moved beyond its specialist lexicon, most notably through its invocation by South Africa at the ICJ in December 2023«.

Le 4 décembre 2024, un nouveau rapport accablant d’Amnesty International a été publié, confirmant le genocide en cours sur le territoire palestinien de Gaza (voir rapport).

Quelques interviews recommandées

Afin de mieux comprendre le non-sens de la stratégie israélienne à Gaza, en violation flagrante (et documentée) des règles les plus élémentaires de l’ordre juridique international et dont le non-respect devrait être, d’un strict point de vue juridique, sanctionné par la communauté internationale dans son ensemble, il n’est pas superflu de se référer à cet entretien avec l’une des grandes spécialistes françaises du Proche-Orient, suite à la publication de son livre, qu’elle a présenté début octobre 2024, intitulé « Le livre noir de Gaza », (ainsi qu’à cet article de Libération et à celui publié dans Le Monde du 8 octobre). Un second entretien, plus récent (31 octobre), est également fortement recommandé.

Pour comprendre le jeu subtil auquel se livrent les autorités israéliennes depuis le 7 octobre 2023 afin d’instrumentaliser le traumatisme qu’il a représenté pour la société israélienne, avec un grand succès dans certains milieux politiques de diverses parties du monde, nous recommandons cette interview récente de Democracy Now d’octobre 2024 avec une spécialiste américaine de la société israélienne, intitulée : « Naomi Klein : Israel has weaponised Oct 7th trauma to justify its genocide in Gaza ».

Enfin, l’interview réalisée par Democracy Now aux Etats-Unis fin octobre 2024 avec la rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la portée de son dernier rapport (rapport A/79/384 intitulé « Genocide as colonial suppression ») mérite également d’être mentionnée, compte tenu du véritable black-out de plusieurs médias internationaux sur la portée et la signification de son rapport (voir hyperlien vers son interview, disponible sur YouTube).

On ajoutera enfin cet interview réalisé depuis la Belgique concernant la décision de la CPI du 21 novembre faite à la même rapporteuse spéciales des Nations Unies (voir hyperlien) et une conférence donnée ces jours derniers organisée par le Islamic Relief Canada (voir video).

Un pas de plus pour les victimes palestiniennes et pour la justice pénale internationale

Depuis le 21 novembre 2024, la communauté internationale peut compter avec un second pas capital d’une importance historique pour les victimes palestiniennes et plus généralement, pour la justice pénale internationale; ainsi que pour la lutte contre l’impunité à laquelle les autorités israéliennes se sont habituées depuis de nombreuses années, assurées par la protection de leur allié nord-américain inconditionnel.

En février 2021, un tout premier pas, tout aussi capital, avait été franchi, dans une décision peu médiatisée et fort peu commentée de la CPI (voir texte en anglais) dans laquelle la Chambre préliminaire de la CPI a conclu (page 60) être parfaitement habilitée du point de vue juridique pour examiner la situation sur l’ensemble du territoire palestinien, sans exception d’aucune sorte : voir notre article en espagnol à ce sujet publié par le Réseau International des Droits de l’Homme (RIDH) intitulé «Corte Penal Internacional (CPI) / Palestina: se despeja el camino para la justicia penal internacional» et également publié en français sur quelques sites (Note 7).

Il va sans dire qu’a peine prononcée, cette décision de la CPI a donné l’occasion aux Etats-Unis de manifester leur ferme opposition (voir communiqué du Département d´Etat du 5 février 2021). Lorsqu’une enquête a été formellement ouverte par le Bureau du Procureur de la CPI quelques semaines plus tard en mars 2021, les Etats-Unis se sont sentis une nouvelle fois obligés d’exprimer haut et fort leur refus catégorique (voir le communiqué du Département d’Etat du 3 mars 2021).

Il est à noter que l’annonce officielle de la CPI du 21 novembre 2024  concernant ces mandats d’arrêt a été précédée 24 heures plus tôt par une énième tentative des États-Unis au Conseil de Sécurité pour bloquer avec leur véto une décision concernant Gaza (voir notre brève note en espagnol): le délégué nord-américain a choisi d’exercer seul son droit de véto face aux 14 votes favorables des autres États Membres. Il s’agit en fait du quatrième véto solitaire des États-Unis depuis le 7 octobre 2023 au Conseil de Sécurité. Il s’agit aussi du tout premier véto post électoral en ce mois de novembre 2024, qui infirme l’idée selon laquelle, «libérée» des contraintes électorales jusqu’au 5 novembre, l’actuelle administracion nord-américaine sortante pourrait (enfin) prendre ses distances avec Israël (et laisser passer une résolution au sein du Conseil de Sécurité en vue de freiner sa logique destructrice insensée à Gaza, mais aussi au Liban depuis la mi-septembre) : c’est ce qui avait été observé en décembre 2016, avec  l’adoption de la résolution 2334 le 23 décembre 2016, adoptée avec 14 voix pour et une abstention (Etats-Unis), et ce malgré les pressions en tout genre déployées Israël et par … le Président élu Donald Trump (Note 8).

Comme rappelé au début de ces quelques réflexions, c’est par la voix de sa plus haute autorité que les Etats-Unis se sont empressés de disqualifier la décision de la CPI: voir communiqué officiel de son Président, en date du 21 november 2024.

Au delà des opinions issues des cercles politiques nord-américains concernant la CPI, et de leur compréhension somme toute assez particulière de l’ordre juridique international, les mandats d’arrêt délivrés ce 21 novembre par la CPI obligent désormais les 125 États membres du Statut de Rome (voir l’état officiel des signatures et ratifications) à livrer les deux dirigeants israéliens s’ils se trouvent sur leur territoire, ou dans des avions, navires ou autres espaces soumis à leur juridiction: ce qui rendra leurs déplacements à l’étranger nettement plus difficiles. La même possibilité s’étend également au dirigeant du Hamas susmentionné (et qui est considéré comme étant toujours en vie, soit quelque part dans la bande de Gaza, soit à l’extérieur de celle-ci).

En même temps, cette décision de la Chambre préliminaire lance une longue procédure interne à la CPI pour assurer las poursuite et le jugement futur des deux dirigeants israéliens et du chef militaire du Hamas.

Au plan diplomatique, le vif échange survenu entre les représentants d’Israël et de la Palestine lors de la session du 25 novembre 2024 du Conseil de Sécurité  (voir video) permet d’observer l’embarras et la grande difficulté de la délegation israélienne devant ses pairs du Conseil de Sécurité depuis que ces mandats d’arrêts ont été confirmés para la CPI.

En guise de conclusion: la clarté du message envoyé par la CPI aux autres Etats et à d’autres juges

Ces mandats d’arrêt envoient en premier un signal clair à divers États et secteurs politiques qui considèrent depuis un certain temps la justice pénale internationale comme partiale et orientée, en particulier situés sur le continent africain. On rappelera que le premier Etat qui a ratifié le Statut de Rome de 1998 a été le Sénégal (février 1999), et que c’est la ratification número 60 de la République Démocratique du Congo qui a permis son entrée en vigueur (avril 2002). Suivis par bien d’autres Etats de la région, l’enthousiasme initial pour la justice pénale internationale a fait place à un malaise profond en Afrique (Note 9) en observant une CPI particulièrement active en Afrique et beaucoup moins ailleurs, au point de mener plusieurs Etats africains à dénoncer le Statut de Rome : le Burundi en octobre 2016 (voir note diplomatique), la Gambie en novembre 2016 (voir note diplomatique) et l’Afrique du Sud. Concernant cette dernière, sa décision d’octobre 2016 (voir note) a été révoquée quelques mois plus tard, en mars 2017 (voir note) : on notera le message envoyé par le délégué de l´Afrique du Sud lors de l’Assemblée des Etats Parties au Statut de Rome ce 2 décembre 2024 (Note 10)

Des critiques concernant la CPI ont également pu s’entendre en Russie et de la part de ses alliés les plus proches, notamment depuis le mois de  mars 2023, lorsque la CPI a émis un mandat d’arrêt contre son Président et une haute fonctionnaire russe chargée d’envoyer en Russie des enfants capturés en Ukraine : voir communiqué officiel de la CPI du 17 mars 2023.

En outre, ces mandats d’arrêt décidés ce 21 novembre 2024 envoient un message des plus clairs aux États qui, pour une raison ou une autre, continuent de négocier des accords bilatéraux avec les autorités israéliennes actuelles et s’aventurent à les annoncer au beau milieu d’un sommet mondial: lors de la récente COP29 sur le climat à Bakou, en Azerbaïdjan, le Costa Rica a créé la surprise en annonçant la signature d’un protocole d’accord avec Israël en matière d’environnement (voir le communiqué officiel de ses autorités environnementales du 13 novembre et le communiqué officiel de ses homologues en Israël). A peine connue la nouvelle, le Costa Rica s’est vu décerner le prix de «Fossile du jour» par des organisations environnementales internationales: voir l’article publié dans l’hebdomadaire costaricien Ojoalclima, dont la toute dernière partie met en évidence le silence embarrassé (soudain) des autorités costariciennes sur le sujet. Dans un tout autre domaine, le Costa Rica négocie avec Israël depuis 2023 un traité de libre échange (voir communiqué officiel des autorités du commerce extérieur du mois d’octobre 2024), sans que ses autorités n’aient songé à suspendre ces négociations sine die.

Enfin, ces mandats d’arrêt contre deux dirigeants israéliens envoient un signal inéquivoque aux États qui, pour une raison ou une autre, jugent bon de continuer à faire des affaires avec Israël comme si de rien n’était, notamment dans le domaine du commerce des armes et dans bien d’autres domaines hautement stratégiques (fourniture de pétrole notamment, mais aussi de composants électroniques nécessaires aux systèmes d’information et de communication utilisés par l´armée israélienne).

Il se pourrait enfin que des juges nationaux hésitant saisis d’action en justice y trouvent une raison supplémentaire qui manquait au dossier jusqu’ au 20 novembre dernier, pour statuer sur les affaires dont ils sont saisis en faveur des victimes palestiniennes, en conformité avec l’obligation générale des Etats de prévenir le crime de génocide et les crimes de guerre. Il est bon de rappeler que nombreux sont les soldats israéliens exhibant leurs «trophées» et leurs crimes de guerre à Gaza sur les réseaux sociaux possédant un autre passeport en plus du passeport israélien (Note 11).

Il va sans dire que pour le Conseil de Sécurité, l’Assemblée générale des Nations Unies, le Conseil des Droits de l’Homme, et d’autres organes, cette décision constitue un nouvel élément qui devrait faire l’objet de références dans de futures résolutions sur Gaza, et plus généralement, sur la question palestinienne. Pour l’Afrique du Sud, cette décision des juges de la CPI ouvre aussi la voie à une nouvelle demande urgente en indication de mesures conservatoires dans la cadre de l’affaire Afrique du Sud c. Israël devant l’autre juridiction internationale siégeant à La Haye: la CIJ (voir texte de sa requête introductive d’instance du 29 décembre 2023). Dans sa requête initiale, on y lisait (point 4) une description de l’action israélienne confirmée depuis lors (décembre 2023) par les faits et la réalité sur le terrain:

«4. Les faits sur lesquels l’Afrique du Sud s’appuie dans la présente requête, et qui seront exposés plus en détail au cours de la procédure, établissent que, dans un contexte d’apartheid, d’expulsion, de nettoyage ethnique, d’annexion, d’occupation, de discrimination et de négation persistante du droit du peuple palestinien à l’autodétermination, Israël, en particulier depuis le 7 octobre 2023, manque de prévenir le génocide et de poursuivre les auteurs d’actes constitutifs d’incitation directe et publique à commettre le génocide. Plus grave encore, Israël s’est livré, se livre et risque de continuer à se livrer à des actes génocidaires contre le peuple palestinien de Gaza».

Ce 2 décembre 2024, devant les autres Etats Parties au Statut de Rome, le délégué de la Palestine a pour sa part averti (voir texte complet de son intervention) que:

«In fact, some States Parties are now attempting to excuse themselves out of their obligations under the Rome Statute to preserve Israeli exceptionalism. It doesn’t matter what debunked pretext such States Parties are advancing to exempt accused Israeli war criminals from accountability. What they are in fact doing is endorsing anti-Palestinian racism and double standards while also deconstructing the Court and the mechanisms of international law, condemning humanity to lawlessness and the normalization of the atrocities this Court was established to combat«.

– – Notes – –

Note 1:  La jurisprudence des chambres préliminaires de la CPI est assez claire concernant les immunités des chefs d´Etat (et un webinaire discret avec le département juridique du Quai d’Orsay s´impose, et ce au plus vite…). A propos de l’Afrique du Sud et du passage sur son territoire du chef d’Etat soudanais (voir décision du 6 juillet 2017), il fut indiqué (page 44) que: «The Chamber concludes that, by not arresting Omar Al-Bashir while he was on its territory between 13 and 15 June 2015, South Africa failed to comply with the Court’s request for the arrest and surrender of Omar Al-Bashir contrary to the provisions of the Statute, thereby preventing the Court from exercising its functions and powers under the Statute in connection with the criminal proceedings instituted against Omar Al-Bashir«. A propos de la Jordanie et du passage sur son territoire du chef d´Etat soudanais, la CPI avait eu l’occasion d’indiquer (voir décision du décembre 2017, page 17) que: «the immunities of Omar Al-Bashir as Head of State, under customary international law, do not bar States Parties to the Rome Statute from executing the Court’s request of his arrest and surrender for crimes under the jurisdiction of the Court allegedly committed in Darfur within the parameters of the Security Council referral«. A propos de la Mongolie et du passage sur son territoire de Vladimir Putin, en octobre 2024 (voir décision) la Chambre préliminaire de la CPI a également précisé que: «27. Consequently, article 27 of the Statute has the effect of removing any and all international law immunities of officials, including Heads of State, and binds to that effect States Parties, as well as States that have accepted the Court’s jurisdiction, not to recognise any kind of immunity or apply special procedural rules that they may attach to any persons. Whether these persons are nationals of States Parties or nationals of non-States Parties is irrelevant. The Statute, in any case, does not make any distinction in this regard. States Parties and States that have accepted the Court’s jurisdiction have therefore the obligation to arrest and surrender any person for whom the Court has issued a warrant of arrest, irrespective of their official capacity and nationality. The obligation to arrest and surrender is one of the means to ‘give effect’ to the obligation to cooperate with the Court in the execution of its mandate«.  A aucun moment la France n’a objecté, en qualité d’Etat Partie au Statut de Rome, ces décisions des juges de la CPI, ce qui rend encore plus surprenant son communiqué en date du 27 novembre 2024. Su ce dernier, on renvoie également à cette entrevue fort bien menée et intitulée «Les déclarations de la France sur l’immunité de Netanjahu est fausse: Clémence Bectarte» du 29 novembre 2024.

Note 2: On a pu lire sur cet avis consultatif dans la presse  en France de la part de l’un des grands spécialistes du droit international public, que: «…. l’avis est une formidable victoire, et, juridiquement, parfaitement fondé. La Cour a rappelé avec fermeté que, « du point de vue juridique, le territoire palestinien occupé constitue une seule et même entité territoriale, dont l’unité, la continuité et l’intégrité doivent être préservées et respectées », y compris Jérusalem-Est et Gaza. Israël est dans l’obligation de cesser immédiatement toute nouvelle implantation, toute nouvelle activité de colonisation et d’évacuer tous les colons» (voir article paru dans LeMonde du 29 juillet 2024 et intitulé «Alain Pellet, juriste : « La Cour internationale de justice redore le blason du droit international si malmené par ailleurs«. Cf. aussi DUBUISSON F., «Les conséquences de l’avis de la CIJ relatif à l’occupation du Territoire palestinien«, Yaani, édition du 29 juillet 2024. Texte complet disponible ici; ainsi que MAIA C.& POISSONIER G., «Avis de la CIJ de 2024 relatif à l’occupation du Territoire palestinien : une analyse au prisme du droit international des droits humains«, publié sur le site Actualités Droits – Libertés, 2024, édition du 7 octobre 2024. Texte complet disponible ici. Nous renvoyons nos lecteurs à notre note publiée en espagnol: BOEGLIN N., «Ocupación prolongada y colonización ilegal israelí del territorio palestino: apuntes con relación a la reciente opinión consultiva de la Corte Internacional de Justicia (CIJ)», éditée le 19 juillet 2024. Texte complet disponible ici.

Note 3: Cf. notre article BOEGLIN N., «Gaza / Israël : le Procureur de la CPI réaffirme l’urgence d’émettre des mandats d’arrêt «, Pressenza, édition du 4 septembre 2024. Texte complet disponible ici. Le texte a aussi été publié au Liban sur le site d’information de LibnanNews.

Note 4: L’offensive militaire d’Israël à Gaza entre le 28 décembre 2008 et le 17 janvier 2009 (voir l´hyperlien vers le rapport des Nations Unies) s’est soldée par le bilan suivant : 13 victimes israéliennes contre plus de 1400 Palestiniens de Gaza tués : voir la section « casualties » aux paragraphes 352-364 du rapport détaillé.

Note 5: Cf. FERNANDEZ J., La politique juridique extérieure des Etats-Unis à l´égard de la Cour pénale internationale, Paris, Pedone, 2010, p. 325. Quelques déclarations du chef de la délégation étasunienne après la conférence de Rome de juillet 1998 sont également éclairantes: «En ce qui concerne Israël enfin, David Scheffer reconnut après Rome que la délégation américaine avait endossé la crainte d´Israël d´être victime d´accusations devant la future Cour en raison de sa politique dans les territoires occupés» (p. 172). On lira également avec intérêt la tentative des Etats-Unis d´exclure de la définition de crimes de guerre le « transfert par un Etat d´une partie de sa population dans un territoire qu´elle occupe » (pp. 171-172).

Note 6: Cf. BURGIS-KATHALA M. & MASETTI PLACETI M., «Lost for words, yet grasping for neologisms: Gaza, genocide and the discursive limits of international law«, Ejil-Talk, édition du 14 novembre 2024. Texte complet disponible ici.

Note 7: Cf. notre article BOEGLIN N., «Palestine / Cour Pénale Internationale (CPI) : brève mise en perspective concernant la décision récente de la Chambre Préliminaire«, Le Monde du Droit, édition du 24 févier 2021. Texte complet disponible ici, également publié dans une version plus longue sur le Club de Media Part, édition du 17 mars 2021.  Cf. aussi DUBUISSON F., «Le jugement de la Chambre préliminaire de la CPI du 5 février 2021 statuant sur la compétence territoriale de la Cour en Palestine«, Le Club des Juristes, édition du 2 mars 2021. Texte complet disponible ici.

Note 8:  Cf. sur cette importante résolution réconciliant le Conseil de Sécurité avec le droit international et sa violation répétée par Israël dans le territoire palestinien occupé, notre note BOEGLIN N., «La résolution 2334 (2016) du Conseil de Sécurité des Nations Unies condamnant la politique de colonisation israélienne: brève mise en perspective«, publiée également sur le HuffPost (Paris) dans son édition du 2 janvier 2017 et le site de DiplomatMagazine (La Haye). Texte disponible ici.

Note 9: Cf. NYABEYEU TCHOUKEU L. «L’Afrique et la Cour pénale internationale«, publié dans la revue Recherches Internationales, n°105, 2015, pp. 153-168. Texte disponible ici.

Note 10: On lit que pour l’Afrique du Sud (voir le texte complet de sa déclaration): «We appreciate the significant steps that have been taken in the past year in various situations, including the conviction and sentencing of Mr Al Hassan, and the issuing of arrest warrants. In particular, South Africa welcomes the progress in the investigation into the crimes committed in the situation in the State of Palestine, which has produced evidence considered sufficiently compelling for the Pre-Trial Chamber to issue three arrest warrants in that situation against leaders of Israel as well as Hamas. 

At this time, we are also aware that the ICC is at a critical juncture and the Court’s ability to remain independent and impartial has never been more crucial. It is 3 necessary for states parties to reaffirm their commitment to the Rome Statute and work collectively to protect and strengthen the ICC. 

South Africa strongly condemns the continued attacks and threats against the ICC, its officials, and its operations. These acts of intimidation are not solely attacks on individuals, but on the establishment of international justice itself. The ICC’s ability to deliver justice depends on the safety and independence of its staff and officials. Any attempt to undermine the Court through threats or coercion must be met with unequivocal resistance by all States Parties. More than ever, it is important that States Parties make clear their unwavering support for the Court, and its officials, as well as their work in all situations«.

Note 11: Concernant un soldat israélien possédant un passeport délivré par la France accusé d’actes de torture, voir cette cette note parue dans Le Monde en avril 2024. Concernant deux soldats belgo/israéliens, dont l’ un est un franc-tireur, cette note de JusticeInfo d’octobre 2024 détaille ces deux affaires devant les tribunaux belges. On y lit que: «Il faut faire respecter le droit international pour forcer un cessez-le-feu et mettre fin à  l’impunité qui nourrit les crimes suivants. La justice belge doit faire sa part du travail, aux cotés de la justice internationale«. Le Royaume-Uni recense pour sa part une centaine de ses ressortissants dans les rangs de l’armée israélienne envoyée à Gaza (voir note de presse). Il serait bon que chaque Etat s’inspire du Royaume-Uni et identifie ses ressortissants combattant à Gaza afin de les rechercher pour savoir si ils sont (ou non) responsables de crimes de guerre. Enfin ce 3 décembre 2024, la presse en Belgique fait état d’une action intentée contre l’attaché militaire de l’ambassade d’Israel nommé à Bruxelles (voir note de 7 /7).

Nicolás Boeglin

Profesor de Derecho Internacional Público, Facultad de Derecho, Universidad de Costa Rica (UCR)

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